PARATII-2 Convoyage 2023

Après deux longues années d’attentes, la goélette Paratii-2 est enfin prête à changer de propriétaire et à démarrer une nouvelle vie.

Une équipe de marins chevronnés composé de : Mathieu, le capitaine; Nathalie, second capitaine; Claire, chef mécanicienne; Matthjis, second mécanicien; Marie, cuisinière, ainsi que Stéphane, coordinateur du projet, rejoint le Brésil à l’automne 2022 pour rapatrier le navire en France.

L’équipe fait connaissance avec la goélette à la Marina do Engenho dans le village de Paraty, Etat de Rio de Janeiro. Paratii-2 est imposant et inspire confiance par sa masse et son architecture. Sa coque en aluminium et ces deux grands mats arqués attirent l’attention. Ces mâts sont atypiques, d’une part par leurs formes, mais également par leurs fonctionnements. Ce sont des mâts autoportés à balestron, dont la particularité est d’être rotatif. Ils sont autoportés grâce à leurs épaisseurs et à leurs passages à travers le pont, ce qui leurs donnent une stabilité même sans haubans. Cette particularité de balestron permet à Paratii-2 d’être manœuvré avec un équipage réduit. Cet avantage, lui permettra d’accueillir à son bord de nombreux scientifiques lors des campagnes d’échantillonnage.

L’équipage poursuit la découverte du navire. A l’intérieur, il est impossible de manquer l’énorme espace alloué au stockage dans la soute arrière. Ce grand espace ouvert accueillera les futurs laboratoires. L’équipage constate également la redondance de beaucoup de systèmes à bord pour la sécurité et la navigation. Le navire a été pensé et conçu pour des expéditions dans des milieux polaires et éloignés de la civilisation.

Paratii-2 a tout de même besoin d’une remise en forme avant de reprendre le large. Sans tarder, l’équipage hautement qualifié s’attèle à la tâche et procède à la révision du navire en inspectant : les moteurs, les générateurs, le gréement, le système électrique, le système d’assèchement, les instruments de navigation, etc. La remise en état du navire va durer deux semaines, durant lesquelles l’équipage fait la connaissance de l’ancien propriétaire, Amyr Klink.

Amyr est une légende au Brésil. L’ancien explorateur et passionné des milieux polaires a navigué de nombreuses années dans l’Océan Austral avec sa famille. Il a notamment effectué une circumnavigation de l’Antarctique en solitaire ainsi que des hivernages en Antarctique et en Arctique. Amyr Klink doit sa réputation à ses talents d’écrivain, mais également à une traversée en solitaire de l’Atlantique Sud à la rame de Lüderitz (Namibie) à Salvador (Brésil).

Le 29 octobre 2022, le départ est enfin lancé. Les autorités brésiliennes donnent le feu vert à Paratii-2 pour aller rejoindre Angra Dos Reis, une ville a une trentaine de milles nautiques plus au nord, afin de finaliser les documents d’exportation.

L’arrivée à Angra Dos Reis tombe en pleine période électorale. L’équipage ressent vite que la situation est tendue. Lula, ancien président et représentant du Partis des travailleurs, et Jair Bolsonaro, actuel président et représentant du Parti libéral, s’affrontent dans le cadre d’un duel politique à l’issue incertaine. Des barrages routiers s’hérissent dans la ville. Les journées sont rythmées avec les bruits d’explosion d’engins pyrotechniques. Quelques jours plus tard, l’équipage décide de se rendre plus au nord, soit en direction de João Pessoa dans l’Etat de Paraiba pour terminer les documents d’exportation, où semble-t-il la procédure serait plus rapide.

Après un départ en pleine tempête et quelques problèmes techniques, Paratii-2 arrive sept jours plus tard à João Pessoa. L’équipage est accueilli à la Marina Jacaré Village. L’ambiance dans le village est détendue. L’équipage en profite pour se faire un bon repas en dégustant quelques caïpirinhas. Les deux semaines qui suivent furent occupées à réparer les différents systèmes qui ont failli durant la dernière navigation, ravitailler le navire, obtenir toutes les autorisations nécessaires pour quitter le Brésil et changer de pavillon.

En effet, le pavillon Suisse initialement envisagé reste inaccessible, car le navire ne répond pas à tous les critères émis par l’Office Suisse de la Navigation Maritime (OSNM). Le 25 novembre 2022, un pavillon de plaisance provisoire est finalement obtenu de la part des Autorités maritimes britanniques. Le navire est alors renommé Forel et l’équipage termine les procédures d’exportation. Le 25 au soir, Forel entame son périple transatlantique, cap sur les Açores. Une fois en mer, un certain soulagement se fait ressentir au sein de l’équipage. Le convoyage, mission pour laquelle l’équipage avait été rassemblé, peut enfin débuter.

En mer, la routine s’installe, par équipe de deux, les quarts s’organisent. Le manque de vent oblige à naviguer en s’appuyant sur un moteur. Le passage de l’équateur s’effectue en respectant les coutumes - une offrande est faite à Neptune pour demander l’autorisation de passer l’équateur et de naviguer d’un hémisphère à l’autre avec bon vent et belle mer. Neptune laisse passer Forel. Toutefois, les vents souhaités se font toujours désirer. Le fameux passage du « Pot-au-noir », zone de convergence des Alizés de l’hémisphère nord et de l’hémisphère sud, dure plus longtemps que souhaité. Cette zone instable se caractérise par un mélange de zones calmes sans vent et de grains violents.

Malgré une météo capricieuse, un spectacle de bioluminescence s’offre à l’équipage : l’océan s’illumine d’un bleu clair comme par magie en pleine nuit. C’est probablement l’effet d’une petite pluie sur le plancton accroché aux algues des Sargasses qui produit cette réaction lumineuse. Pour le plus grand plaisir de l’équipage, le navire laisse derrière lui une trainée de lumière sur une vingtaine de mètres. Forel semble en gravitation au-dessus des nuages.

Une fois sortie de cette zone, Forel poursuit son cap sur les Açores. Toutefois, la météo en décida autrement. La formation d’un cyclone subtropical oblige l’équipage à changer de cap. Normalement à cette période de l’année, il est plus coutumier de traverser l’Atlantique Nord d’Est en Ouest afin de profiter de vents favorables. L’île de Madère sera donc le lieu du prochain arrêt. Dix-neuf jours après le départ du Brésil, Forel et son équipage arrivent de nuit à Madère, fatigués mais heureux d’être arrivés à bon port.

Le repos sera bref : trois jours à peine après avoir touché terre, Le Forel quitte l’île de Madère afin de profiter d’une fenêtre météo favorable pour rejoindre Lisbonne (Portugal). A Lisbonne, l’équipage profite d’un temps d’arrêt pour ravitailler le navire, se reposer et profiter du temps des Fêtes de fin d’année. Un changement d’équipage s’opère durant cette escale. Baptiste, le second coordinateur de projet et futur capitaine, Julien, Gauthier et Chloé rejoignent Mathieu et Nathalie. Forel cabotera le long des côtes portugaise, espagnole et française avant d’arriver le 3 janvier 2023 à Brest (France). C’est en Bretagne que les travaux de réaménagement s’opèreront. Forel sera transformé en un voilier destiné à la recherche polaire avant d’entamer sa première expédition à l’été 2024.